CollectionLes rochers fauves
Clément Chapillon interroge la notion d’isolement géographique et mental à travers un espace insulaire en mer Égée. Il découvre l’île grecque d’Amorgos il y a une quinzaine d’années, qui est devenue au fil du temps une nécessité et une obsession. Une île éloignée, l’une des plus pauvres et des moins densément peuplées de toute la Grèce, mais aussi l’une des plus fascinantes par sa géographie et ses traditions encore intactes. En saisissant l’intimité des iliens, de naissance ou d’adoption, la topographie et le vernaculaire de l’île, il entreprend en 2018 un travail documentaire de fond qui prend fin 2 ans plus tard.
Que devient l’identité quand elle est entourée d’eau de
toutes parts ? Que devient notre rapport au sacré, au minéral, à l’animal et à l’imaginaire ? Si le mot isolé signifie littéralement « prendre la forme d’une île », comment donner forme au sentiment « d’iléité » ?
Au fur et à mesure de ses voyages, l’emprise de l’île se fait de plus en plus pesante, le temps et l’espace se dilatent, une sensation de déréliction nous envahit sous le regard effrité des icônes. Comme le disait la romancière Francesca Melandri, « Si l’on veut garder quelqu’un vraiment à l’écart, il n’y a pas de mur plus haut que la mer ». Avec l’isolement s’installe une polarité, à la fois sombre et solaire. Sous la blancheur immaculée des murs et la beauté fauve des roches se cache un mystère, une inquiétante étrangeté.
Cette quête photographique entre en dialogue avec l’un des premiers écrits sur cette île, sous la plume d’un archéologue, Gaston Deschamps, qui écrit la « Grèce d’aujourd’hui » en 1880. Une mythologie insulaire se dessine alors, à près de 140 ans d’intervalle, ou un palimpseste de mots du passé résonne avec le réel d’aujourd’hui.
